Disclaimer – ce billet d’humeur est un point de vue entièrement personnel. Il est basé sur mon expérience de blogueuse et ma vision de l’évolution de ce média. Il ne vise absolument personne en particulier et ne cherche aucunement à discréditer le travail de mes consoeurs blogueuses & youtubeuses, à faire de généralités ou encore moins à affirmer que je fais mieux que tout le monde. Il est simplement posté ici afin de soulever des questions, d’échanger ensemble (entre blogueuses, entre youtubeuses, entre lectrices, entre journalistes… C’est sympa de confronter les opinions de chacun).
Il y a plus de dix ans, j’ai commencé à bloguer par hasard. Sur Skyblog, d’abord : j’y racontais mes pérégrinations de néo-parisienne perdue en hypokhâgne. Il faut dire que La Critique de la Raison Pure ne m’inspirait pas vraiment… Et puis, j’ai continué mes études, dans la communication et le journalisme. J’ai fait tous mes stages dans la presse féminine (au sein des rubriques beauté des magaines print puis web) et j’ai créé Blog Tendance Mode.net en parallèle à mes études.
Au départ, Blog Tendance Mode n’avait pas d’autre raison de montrer que j’aimais écrire sur la beauté – domaine dans lequel je n’y connaissais strictement rien. Je pensais que mes maîtres de stage et mes futurs employeurs me liraient et auraient ainsi envie de travailler avec moi. La réalité a été surprenante mais très cool : ce blog amateur n’intéressait pas vraiment les pros du secteur (certains se moquaient même de moi) mais des inconnu(e)s s’y sont connecté(e)s par hasard. Nous avons commencé à échanger à travers les commentaires. La communauté Blog Tendance Mode était née.
Je me suis prise au jeu, je me suis mise à bloguer presque tous les jours et à attendre les commentaires de mes lectrices. Parfois on débattait violemment et on se détestait. Parfois je disais trop haut ce que beaucoup pensaient tout bas. Souvent, on s’aimait très fort et on se réunissait autour de valeurs simples : la curiosité, la passion des cosmétiques, la volonté d’apprendre ensemble, le plaisir de partager. C’était chouette et franchement bon enfant.
Et puis. L’arrivée des marques
Et puis tout ça a muté. Les marques nous ont contactées. La presse nous a encensées avec des classements de blogueuses (dont j’ai moi-même bénéficié en 2008). Les régies publicitaires se sont intéressées à notre audience, car toutes les audiences mises bout à bout, c’était franchement énorme.
Je me souviens du jour où j’ai signé mon contrat de régie pub. J’avais à peine 20 ans. Je sentais qu’à ma manière, je participais à la construction d’un nouveau media. Les premières opérations avec les marques étaient géniales, on créait des choses qui changeaient de ce qu’on voyait partout et qui restaient profondément en accord avec nos valeurs.
Les lectrices nous suivaient bien volontiers, car elles savaient qu’on étaient des filles comme elles, des girls next door à qui les médias globalement très stéréotypés ne laissaient pas vraiment la parole. Les filles normales semblaient avoir pris le pouvoir.
Et puis. Le fast-blogging
Et puis là encore, ça a changé. Certaines girls next door, très courtisées, ont opéré une nouvelle mue. Elles ont compris que leur image pouvait être un business.
En quelques années, elles sont devenues des cyber-égéries. Leur business ? Leur mode de vie parfait : leur crème miracle, leur shampooing qui les rend si waouh, leurs voyages géniaux, leur mec, leur place to chill du moment. Leur avis ? Il n’y en a plus beaucoup. Ou du moins, vous ne saurez jamais ce qu’elles pensent vraiment puisqu’elles n’ont aucun intérêt à dire qu’elles n’aiment pas la marque Z, car on ne sait jamais, Z pourrait un jour les contacter pour une opé. Les avis négatifs sur les blogs ou les chaînes Youtube ? Il n’y en a plus beaucoup. Chez certain(e)s, cela a carrément disparu du paysage pour ne vexer personne. Heureusement, d’autres continuent de faire part de leur avis, quel qu’il soit, car c’est l’essence-même du blogging ou du vlogging.
Pour d’autres dont le blogging n’est pas le métier, le fast-blogging peut aussi s’appliquer : c’est alors la course aux rouges à lèvres, aux présentations produits et aux trucs gratuits.
Mais. Il y a encore beaucoup d’espoir.
A côté de ce fast-blogging, il y a des gens pour qui la professionnalisation du blog se fait autrement. Il y en a comme Garance Doré qui ont un véritable talent, celui de voir la mode autrement à travers des photos et des illustrations, et qui en ont fait un très beau métier. Il y a aussi Lisa de MakeMyLemonade qui ne met pas ses oeufs dans le même panier et semble se construire un très bel avenir. Il y a ces filles qui ont un métier super intéressant comme SuperbyTimai et qui le mettent au service de leur blog, pour raconter de belles histoires et créer des contenus divers et variés.
Toutes ces carrières sont intéressantes à suivre car elles montrent que l’on peut effectivement travailler avec des marques ou même créer un vrai média (c’est aussi ce que fait Garance) sans trahir ce que l’on est vraiment.
Et n’oublions pas que si la professionnalisation de la blogosphère féminine est un sujet en vogue en ce moment, la majorité des blogs sont des blogs amateurs tenus par des filles passionnées.
Tout ça pour quoi ?
Car pour certains « blogueuse », c’est super péjoratif. J’ai parfois honte de dire que c’est mon job, car les gens s’en font parfois une très mauvaise image. La faute à tout cet emballement général. La faute aux sponsos dissimulés. La faute aux avis truqués. La faute à la surconsommation qui peut mettre mal à l’aise. La faute… la faute aux blogueuses. La faute aux marques. La faute au manque de remise en question de manière générale.
Chaque matin, je me lève en me disant : « ok, tu as la chance formidable de vivre de ton média, mais n’oublie pas pourquoi tu peux en vivre« . La réponse, vous la connaissez : je dois (presque) tout à mes lectrices. Je sais que si j’en suis là aujourd’hui, c’est grâce à elle et que je me dois de travailler non pas en fonction des marques qui veulent bosser avec moi mais de mes lectrices.
J’essaie de les satisfaire au maximum, je réponds à tous les commentaires du blog, je leur demande sans cesse ce qu’elles veulent lire, j’essaie de créer du contenu qui répond à leurs questions sans chercher à faire mon propre personal branding. Je ne dis pas que c’est LA solution et que celle-ci vaut mieux que celle que d’autres girls next doors emploient. Mais je pense que si on re-centrait un peu plus notre contenu autour du lecteur et non autour de nous-même, de notre vie, et de notre oeuvre, on pourrait à nouveau partager des choses super chouettes avec notre communauté. Comme avant, quoi.
En toute honnêteté, je m’inquiète pour l’évolution de notre média – et aussi des chaînes Youtube, mais c’est encore jeune, je pense que leur « crise » arrivera plus tard. Je ne sais pas de quoi demain sera fait au sujet des blogs. Assisterons-nous à une espèce d’overdose du fast-blogging et une explosion de cette bulle ? Les blogs seront-ils assimilés à la presse par les lecteurs ? Il y a plein de questions à poser autour de cette évolution. Je n’ai pas de réponses mais cela a au moins le mérite d’être intéressant à étudier.
Affaire à suivre, comme on dit…
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(* j’ai bien conscience que mon titre est très maladroit. Vous l’aurez compris, je parle de blogosphère mode, beauté, maman…)
(** Les produits proposés en-dessous de l’article ont bien évidemment 0 rapport avec l’article. Ils arrivent là comme un cheveu sur la soupe. Juste qu’en temps normal, comme je ne parle à 97% que de cosmétiques, je peux pusher en-dessous les produits dont j’ai parlés. Si on clique sur l’image produit, on arrive sur une fiche produit qui permet aux lecteurs de donner leur avis. Si on clique sur le lien, on arrive sur la fiche produit magasin. Bref, ça fait tâche dans ce contexte-ci, j’en conviens ! Pardon !)
Tags: blogs, blogueuses, publicité